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Jean-Paul Sartre en 1956 : le colonialisme est notre honte

lundi 7 janvier 2019, par Michel Berthélémy

Gallimard vient de rééditer les écrits de Sartre sur l’Algérie, dont il a soutenu sans relâche le combat pour l’indépendance. Dans sa présentation de l’ouvrage, Situations V, Séverine Kodjo-Grandvaux rappelle dans Le Monde Afrique l’engagement du philosophe dans sa lutte contre le colonialisme, à une époque où les Français ne se bousculaient pas sur ce créneau.

Elle nous remet notamment en mémoire sa préface, « Orphée noir », à l’Anthologie de la nouvelle poésie nègre et malgache, de Léopold Sedar Senghor, où il évoque le privilège blanc, celui de voir sans qu’on le voie, et de se considérer comme le point de référence, comme l’universel.

Dans son discours Le colonialisme est un système (1956), Sartre dénonce la mystification coloniale et démonte point par point les arguments des colons en faveur d’une Algérie française. Chiffres à l’appui, le philosophe démontre comment la colonisation a paupérisé la population algérienne et comment le développement du pays ne profite qu’aux colons et à un système extrêmement violent mis en place pour nourrir une économie capitaliste. Mais il dévoile également à quel point la métropole a déstructuré la société algérienne et a « fabriqué un indigène » qui ne pourra répondre à la violence française que par la violence et par un nationalisme algérien. Les mots de Sartre sont durs, les phrases chocs rappellent le Discours sur le colonialisme d’Aimé Césaire : le colonialisme, écrit-il, « est notre honte, il se moque de nos lois ou les caricature ; il nous infecte de son racisme […] il oblige nos jeunes gens à mourir malgré eux pour les principes nazis que nous combattions il y a dix ans ; il tente de se défendre en suscitant un fascisme jusque chez nous, en France. Notre rôle, c’est de l’aider à mourir. Non seulement en Algérie, mais partout où il existe. Les gens qui parlent d’abandon sont des imbéciles : il n’y a pas à abandonner ce que nous n’avons jamais possédé. Il s’agit tout au contraire de construire avec les Algériens des relations nouvelles entre une France libre et une Algérie libérée. » L’appartement de Sartre sera à deux reprises plastiqué par l’Organisation de l’armée secrète (OAS)…

Situations V, de Jean-Paul Sartre, nouvelle édition revue et augmentée par Arlette Elkaïm-Sartre, Gallimard, 544 pages, 35 euros.

https://www.lemonde.fr/afrique/article/2019/01/05/jean-paul-sartre-et-l-afrique-decoloniser-l-esprit_5405374_3212.html

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